LE HOUMOUS… Un des grands classiques de la cuisine du Levant que l’on consomme, avec quelques variantes, dans tous les pays qui appartenaient à l’Empire Ottoman : les Balkans, la Grèce, la Turquie, le proche Orient et, je crois, en Égypte. Il est servi tel quel en Thrace, assaisonné de sumac au Liban ou agrémenté de pépins de grenade dans le Croissant Fertile.
Ici, j’ai opté pour la version libanaise, car je compte développer prochainement la « catégorie » mezzé.
Je n’achète plus de houmous déjà prêt depuis que j’ai séjourné en Turquie. J’ai eu la chance d’y arriver à la fin du Ramadan, qui, comme vous le savez, donne lieu à des festins pantagruéliques. Je logeais dans un quartier populaire et typique, au nord de la place Taksim, dans une zone piétonne. Tout le voisinage avait investi l’espace public et avait installé de grandes tablées dans les rues. C’est un peu comme la Fête des Voisins. Mais avec vue sur le Bosphore, et avec d’authentiques mezzés turcs, c’est autre chose.
En me voyant arriver avec ma grosse valise, les voisins ne se sont même pas posé de question. Ils m’ont très gentiment proposé de me joindre à eux. Je n’ai pas toujours réussi à savoir exactement ce que j’ai mangé – le Turc est un idiome très complexe et les stambouliotes sont presque aussi nuls que les Français en langues étrangères – mais je me suis régalé. La bouffe est un langage universel! A peine arrivé, j’ai vécu une soirée en complète immersion. J’ai adoré ! Et, surtout, j’ai vu la voisine préparer le houmous.
¡ Ce que j’ai vu m’a fasciné !
Naturellement, j’ai mis la main à la pâte. C’est un réflexe que j’ai depuis que je suis gamin. J’aidais ma Grand-Mère à préparer le déjeuner dominical. Aucune raison pour que je n’agisse pas de même avec la vieille voisine. Quand elle a vu que je savais éplucher de l’ail, elle a supposé que je savais cuisiner et elle m’a expliqué ses gestes. Pas besoin de comprendre pour capter : c’est d’une simplicité enfantine. J’ai compris rien qu’en l’observant.
Les ingrédient. Il faut :
- Des pois chiche. Je ne transige pas avec les pois chiche ! S’il te plait, n’achète pas ces trucs mous et farineux qu’on te vend en boîte. Le secret c’est justement des pois de qualité, que tu achètes secs et que tu fais tremper une nuit dans une grande quantité d’eau froide. Ils ont autrement plus de gueule que ces machins riquiqui qui ont trempé dans une mixture suspecte à l’intérieur d’une boîte en fer. [Si j’ai le courage, je te flanquerai un billet pour t’expliquer ce que je pense des conserves qu’on trouve dans la grande distrib… Mais j’attendrai d’avoir fidélisé mes lecteurs, parce que je vais ressembler à un râleur rabat-joie, ce qui pourrait rebuter les moins tenaces] En plus d’être meilleur, je te jure que ça a plein d’avantage ! :
- Tu peux préparer la juste quantité de houmous, sans être contraint pas le conditionnement des pois. Sache que le trempage va les faire doubler de volume, c’est un bon indicateur.
- Tu ne vas pas les acheter pour rien. Tu en auras besoin pour faire des fallafels, quand je te montrerai comment on fait.
- C’est simplissime : il te faut une casserole et de l’eau. Point.
- Si vraiment tu as la flemme, achète les en boîte, mais débrouille toi pour que je ne le sache pas. Tu les rinces et tu les égouttes bien.
- De la crème de sésame, ou « tahin » ou « tahini » ou « tahina » ou « tahiné », comme tu veux ! L’essentiel c’est qu’il soit pur sésame. On en trouve un ersatz où la cacahuète vient se mêler au sésame et de ce qui ne la regarde pas ! C’est moins cher, car l’arachide est d’une culture plus facile et d’un meilleur rendement, mais beaucoup moins authentique. Et, si je m’autorise souvent des associations farfelues, je ne rigole pas avec la qualité des produits. C’est même un des seuls trucs sur lesquels je ne plaisante jamais !
- De l’ail. Beaucoup d’ail. Ici, j’ai fait la version « light », mais dans certaines familles libanaises, on n’hésite pas à en mettre 5 ou 6 gousses pour une livre de pois cuits… Je sais, c’est beaucoup… Le printemps radieux nous amène sa cargaison d’ail nouveau. Beaucoup plus doux que son comparse d’hiver qui a perdu de l’eau. Il possède également l’avantage de ne pas avoir germé : il est par conséquent beaucoup plus digeste. C’est le moment d’en profiter, sans avoir à craindre quelques petits désagréments gastriques.
- Du jus de citron. Tu auras sans doute remarqué que celui de la tof présente un aspect assez inhabituel. ¡ C’est normal ! ¿ Tu jettes ton citron après avoir prélevé le zeste, toi ? Et bien, tu sais quoi ? ¡ Moi non plus ! Rien de se perd, (rien ne se crée, c’est moins vrai…), ¡ tout se transforme ! [¡ Hou là là ! ¡ Les références ! La cuisine c’est de la chimie, voir de l’alchimie, je vais pas arrêter de te sermonner avec ça]. Ici, j’ai gardé mon citron après avoir prélevé le zeste pour les madeleines.
- De l’huile d’olive. Puisque tu ne vas pas faire chauffer ton huile, tu peux choisir de l’extra vierge, pression à froid, de très bonne qualité. Mais pitié ! Pour la cuisson : ¡ NON ! Je te l’interdis !
- Du sumac. C’est une baie à la saveur acidulée, qui rappelle un peu le gingembre, avec un petit côté astringent pas désagréable du tout. Tu le trouveras facilement, déjà moulu, dans l’épicerie orientale où tu as tes habitudes. Si tu habites « in the middle of nowhere », ne vas surtout pas t’amuser à herboriser pour en trouver ! D’ordinaire, je suis plutôt du genre à encourage cette initiative, mais pas là. La plupart des variétés qu’on trouve sous nos latitudes sont toxiques.
- Du sel. ¿ J’ai besoin de t’expliquer ce que c’est ?
Si on veut faire les choses bien, le mélange doit se faire au mortier. Mais un robot ménager, ou un moulin à légumes, fait très bien l’affaire.
Il suffit de :
Bien rincer les pois et les faire cuir dans une grande quantité d’eau NON SALÉE. Je te le dis une bonne fois pour toute : les légumineuses se font cuir sans sel !
Juste de l’eau, environ trois fois leur volume et à feu pas trop fort pendant une bonne heure, voire une heure et quart pour les pois chiche. Le temps de regarder un épisode de Doctor Who, par exemple…
Tu les égouttes, mais tu gardes une petite quantité d’eau de cuisson, tu vas bientôt savoir pourquoi.
Tu peux les éplucher, aussi. Je suis lentement en train d’acquérir l’habitude de le faire. C’est long, mais pas très compliqué. Il faut juste tirer sur la petite peau du bout des doigts. Si les pois sont bien cuits, ça va venir tout seul.
Tu mets les pois dans le mixeur et tu appuies sur le bouton. A ce stade, ça va te faire une mixture irrégulière, comme tu peux le voir. Pas de panique, c’est normal ! Ce qui est intéressant avec le houmous, c’est le contraste de texture. Après, à toi de voir. Il y a deux écoles :
- Celle où l’on écrase les pois le plus finement possible, mais on en garde quelques uns entiers qu’on met par dessus pour la « mâche » et la déco.
- Celle où l’on n’écrase pas trop les pois pour garder des « grumeaux ».
Étant rétif au succédané de houmous qu’on trouve tout prêt dans le commerce, je préfère la deuxième option, plus rustique, mais « so home made » !
C’est là que l’eau de cuisson entre en scène : afin de ne pas « saturer » ton houmous de matière grasse, tu vas l’émulsionner progressivement, avec juste 2 ou 3 cuillérées à soupe d’huile, la crème de sésame et cette eau que tu as gardée, jusqu’à obtenir la texture qui va bien.
Tu ajoutes ensuite le sel, l’ail écrasé et le jus de citron, selon ton goût.
Tu goûtes. Avec ce genre de préparation, y’a que ça de vrai ! Quand la texture et la saveur te conviennent, tu peux débarrasser dans un bol avec un film plastique. PAS EN CONTACT LE FILM ! Et hop ! Au frais !
Tu penses à sortir ton houmous un gros quart d’heure avant de servir.
Tu fais un puis au centre et tu arroses d’huile d’olive vierge. Ensuite, tu saupoudres de sumac sur les bords.
Si ça t’amuse, tu peux mettre des cubes de tomates, de radis, de concombre, pour ajouter du croquant, du craquant, du gourmand… [Désolé, je peux pas te faire l’accent de C**** L***** sur ce blog, mais je suis sûr que tu vois très bien à quoi je fais allusion…]
Et voilà !
A servir en apéro, avec des crudités et du pain libanais (à défaut, une tortilla ou un « wrap » fera l’affaire, même si c’est un peu plus épais et dense). Ou a glisser sur la table à côté d’autres petits plats en mode « apéro dînatoire façon mezzé ».
Tu pourras être fier(e) de toi et tes convives seront épaté(e)s de déguster du houmous qui a presque le même goût que celui du resto libanais.
Merci pour la recette. Mais donc, si je comprends bien, toi tu n’enlèves pas la peau de pois ? Cela veut dire que jusqu’ici on perdait du temps en le faisant ? On m’aurait menti à l’insu de mon plein gré ?
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¡ merci pour ton commentaire! On peut, en effet, prendre le temps d’ôter la peau. Je le fais si je fais une préparation plus délicate. Mais pas pour le houmous. Si les pois sont bien cuits, ça ne s’impose pas (et j’assume ma subjectivité)
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Donc ça donne vraiment envie de s’y remettre car c’est cette étape qui rebute en général !
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Franchement, j’aime bien le côté irrégulier de l’affaire quand c’est pas trop « chiadé ». Essaie, tu verras bien!
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Il semblerait, de plus, qu’un trempage et une essorage soigneux enlèvent naturellement la partie la plus coriace de cette indésirable enveloppe 😉
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Miam du houmous !
En fait, j’ai des pois chiche (même pas en boîte !) mais je ne trouve pas de tahin ; où trouves-tu le tien ?
J’attends avec impatience ta recette de fallafels parce que la seule fois où j’ai essayé d’en faire, j’ai eu l’impression de manger des boules de graines pour oiseaux…
Bises
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MIAM, en effet! Tout d’abord : bah… euh… Les pois chiche auront fait s’actionner beaucoup de petits doigts sur les claviers (et j’aime ça!) Il y a une épicerie qui va bien juste en face de la sortie du métro Gambetta 😉 [Ça me donne l’envie de faire un tuto : « où tu dois faire tes courses à Lille si tu veux faire un mezze] Si la question n’est pas valable à Lille, je sais pas…
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